lundi 21 novembre 2011

Justice - Audio, Video, Disco ou "La revue croisée des Humeurs"


J'aime Justice. J'ai découvert ce groupe, comme la plupart des gens, avec le clip "D.A.N.C.E" réalisé par So Me, le directeur artistique du bouillonnant label Ed Banger. J’ai été élevé à la techno minimale, et je ne suis pas comme tous ces élitistes qui crachent sur un son electro dès qu’il présente une once de rock et de saturation. Des gens qui écoutent une musique qui prend ses racines dans l’échange et le partage, et pourtant qui font preuve d’une infinie fermeture à ce niveau.

En 2008, le groupe est entré dans une autre dimension avec la tournée de leur live A Cross The Universe. Sur le modèle des Daft Punk, ils ont repris leur album entier, l’on remixé, trituré, fait frire, rotir, et ont pu transformer un album studio ou un folle expérience live comme il en existe peu. Au cours d'un documentaire dantesque sur leur tournée US, l’image d'un spectateur me revient, suant de bonheur à la sortie d'une de leur prestation:  "This music is the new rock-n-roll man!" Pour moi, il n'était pas loin de la vérité.


Je ne compte pas les titres qui provoquent en moi des émotions rares: « D.V.N.O », « Stress », « DANCE Live version », « Phantom 1.5, « Genesis » et j'en passe…

J'attendais donc avec impatience la sortie de leur 2ème album pour trois raisons:
- Pour savoir si ils pourraient faire mieux ou équivalent.
- Pour pouvoir assister à l'un de leur live, car je suis persuadé qu’il sera énorme.
- Parce que ça fait trois ans que je l'attends.

On démarre avec l’intro de l’album : "Horsepower". Comme à leur habitude c’est gros et lourd. Le premier thème fait bien monter la pression. Les arrangements donnent au tout un son bien gras: on est là dans la pop-rock sale des années 80, les mecs nous crachent du Van Halen dans les oreilles, et ça sonne plutôt bien. Passée l’intro, notre oreille se tend, les poils frissonnent : c’est bon nous sommes rassurés, on retrouve ce son vif et chaud spécifique du duo.

On enchaine avec leur 1er single "Civilization" qui servit de musique à la dernière campagne d'Adidas. Normal, c'est la chanson la plus accessible et une des plus efficaces. Bien que la musique soit bonne, on reste un format tube assez court qui me dérange un peu. Un mix disco-pop qui reste malgré cela réussit.

"Ohio" se trouve être assez simpliste et somme toute banale au premier abord.  J'aime bien le thème joué par un son de synthé assez pur. Cela dit, la chanson reste assez lente et manque un peu d'énergie. La 2ème partie tend à nous secouer tout ça, mais on reste sur notre faim.

A l'écoute de "Canon", un éclair de génie me vient à l'esprit: j'ai l'impression d'entendre Metallica produit par Vitalic. Là je me dit que Justice a inventé l'électro-métal. Je réfléchis à tout ça en buvant une fraise à l'eau. Je finis mon verre. Je me dis finalement que ce n'est pas forcément une connerie. Bref, je suis plutôt content de ma trouvaille lexico-musicale. Je finis mon sirop de fraise et j'écoute "On'n'On". Une balade electro pop lancinante, à des années lumières de la track précédente. Justice, n'est-ce-pas faire surgir une musique des 80s, l'électriser, et nous la balancer à la gueule? Paradoxalement, ce retour en arrière traduit une grande modernité.

La track suivante ne sert à rien. Pas la peine que je vous en parle. Je peux vous parler de celle qui suit. On reconnaît là un sample emprunté à Queen,  puis des riffs de guitare assez bons surgissent mais s’effacent rapidement (dommage) au profit d’un synthé sorti tout droit d’une mauvaise B.O de Zeldu, une espèce d’imitation chinoise de Zelda, qui n’existe pas mais que j’ai inventé pour sortir une espèce de comparaison métaphorique à laquelle personne ne comprend plus rien à ce moment là de la lecture. Ouf, "New Lands" arrive, et je peux recommencer à m’exprimer normalement. Celle-là je l'aime bien. C'est comme si Tina Turner s'était allié à AC/DC pour nous sortir une chanson vendue uniquement sur l’iTunes Store. Ils ont beau se la jouer Mister Pop, on préfère quand même quand Docteur Rock vient nous claquer un coup de guitare dans la gueule. C’est le cas ici. Une track de bonne facture, et nous sommes plutôt content d’enchaîner avec "Helix" qui est du même calibre. Le riff utilisé ici me fait énormément penser à quelque chose, mais quoi ? Je cherche un peu, et là le déclic : on écoute la chanson de Ghost Busters : la preuve est irréfutable mes chers amis. 


                       

En tout cas, ce titre groove bien, c’est dynamique et très dancefloor. On vient sûrement d’enchaîner les deux meilleurs tracks de l’album. Finalement, on enchaine les TROIS meilleures musiques, car le titre éponyme de l’album, « Audio Video Disco » arrive. C’est pour moi LE titre le plus puissant, celui qui pourra bientôt vous retourner littéralement un dancefloor. Je suis persuadé qu’en live il en épuisera plus d’un. L'album finit donc sur une bonne note avec trois musiques bien travaillées, réfléchies et tout simplement bonnes.
D'un point de vue global, que d’influence dans cet album qui semble sonner comme un espèce de Kill Bill musical, bourré de référence en provenance des artistes que le groupe vénère. Le problème de Justice, c’est que leurs influences sont parfois… simplement mauvaises. Personnellement j’ai toujours pensé que les années 80 étaient merdiques musicalement, tout comme les 90s. Et ce n’est pas parce que j’ai grandi à cette époque que je vais commencer à composer du Gala et de l’Effeil 65, non ?

Globalement, j’aime bien quatre titres de cet album, mais je ne suis pas en extase non plus. En fait j’étais plutôt préparé à ça et je ne m’en souciais pas. Car mes amis, je sais pertinemment que Justice produit une musique qui prend toute sa dimension en Live, et cet album studio n’est que l’avant bouche de ce qui nous attend bientôt. Ils ont en quelque sorte distiller leurs ingrédients, fait chauffer les plaques, et nous allons bientôt passer à table. Il serait donc dommage de rendre une sentence définitive à l’égard de cette sortie, tant l’analyse reste incomplète sans l’écoute d’une de leur performance live. J’attends donc le procès en appel, et justice sera faîte.


V





J’ai longtemps considéré la musique electro comme n’appartenant pas à un processus artistique digne de ce nom. Selon moi, l’art, c’est le renouvellement perpétuel du style et du fond, la remise en cause des règles. Sous ces critères, on comprendra aisément que je sois assez souvent frustré par ce qu’on me propose. Pourtant, aux vues des découvertes que j’ai faites par l’intermédiaire de V, je peux dire que j’ai assez souvent été étonné voire agréablement surpris. Malheureusement, cette fois, la tâche sera ardue pour Justice puisque je viens tout récemment de m’intéresser à eux. Aux cours de mes récents travaux, j’ai en effet eu l’opportunité de m’attacher à décrire et comprendre leur stratégie commerciale et autant vous dire que c’est une machine bien huilée. Sombre est la bête et noirs sont ses désirs. Au cours de mes diverses pérégrinations, j’ai eu l’occasion de vous rabâcher les oreilles que la musique elle était soit commerciale, un pur produit destiné à la vente, rien d’autre ; soit artistique. Voyons si la féroce machine s’est transformée en joli papillon…

D’entrée de jeu, les synthés de "Horsepower" sont à la limite de la saturation et nous plongent dans un son dur et froid. Puis les guitares explosent et nous retrouvons cet esprit Justice si singulier mélangeant des couleurs hard rock ainsi que des rythmes et des violons discos. Au niveau mélodique, on est tout de suite dans quelque chose de plus fouillé que la musique électro traditionnelle. On retrouve une alternance de phases musicales propres au rock progressif. Bref, on est dans quelque chose de pas banal et de réfléchi. On revient dans quelque chose de plus brut avec le "Civilization" qui suit. Des voix s’élèvent au dessus des guitares blindées d’effets calibrés à la perfection. La tension monte petit à petit puis le diso refait son apparition dans un refrain frais et entrainant mais pour être honnête, les sons sont en tous points similaires à ceux de la chanson précédant. Ce qu’il y a d’étonnant dans cet album, c’est le nombre de clin d’œil assumés (ou de plagiats, à vous de choisir) fait à la musique rock. On a par exemple un emprunt fait à l’intro mythique de "Baba O’Riley" des Who en conclusion de "Civilization". D’autres voix introduisent ensuite "Ohio" qui part ensuite sur un riff de guitares clinquantes qui ne sont pas sans rappeler un certain "Hotel California" des Eagles. Dans un même temps, on se trouve dans des ambiances sombres mais vivantes proches de celles qu’on peut retrouver dans du Gainsbourg époque "Ford Mustang".


On enchaine sur ce qui est pour moi le meilleur titre de cet Audio, Video, Disco. "Canon" démarre sur un interlude quasi médiéval avant de partir sur un riff puissant et saccadé. Ca bouge bien, on est dans quelque chose de puissant mais de maitrisé, de froid. Les nuances sont assez bien gérées, le tout s’enchaine bien puis éclate sur des guitares vives et brillantes qui détonnent de ce a quoi on avait droit jusqu’à présent. Ces mêmes guitares sont là encore un emprunt fait à un mythe de la musique rock (qui m’échappe pour le moment…) ce qui commence tout de même à laisser un arrière gout de réchauffé…  On’n’on attaque rapidement et laisse planner là encore une atmosphère intéressante. Puis on a de nouveau ce côté disco qui revient à la charge avec des claviers joyeux voire gais sur une musique qui partait sur quelque chose de plutôt sombre. Le tout n’est pas sans rappeler certains tubes des années 80, soit encore tout un patchwork musical difficile à aborder. On enchaine sans s’arrêter sur "Brianvision" et ces guitares électriques aux mélodies descendantes de métal ralenti qui, personnellement me replonge dans les meilleurs génériques de mangas des années 90. C’est gai, colorée mais ça se veut bizarrement tragique. Là encore, je suis perplexe mais j’y reviendrai.


Le froid refait son apparition avec "Parade" qui semble vouloir nous doucher. On retrouve une guitare digne d’un Van Halen des années 90 là encore. Puis des synthés d’un autre temps et des voix entrent dans la danse et le tout commence à prendre une couleur intéressante. On retrouve des guitares lourdes et saccadé auxquelles se mêle une rythmique des 80’s plus kitsch qu’un single original d’Indochine. Vous n’êtes pas sans savoir que j’exècre plus ou moins tout ce qui fut créé à cette époque. Il en va bien sûr de même pour tout ce qui s’y apparente. "Newland" nous amène dans un son mêlant des influences de Supertramp, d'ACDC et de disco, toujours... Puis un riff de guitare, clairement volé à Led Zeppelin cette fois, démarre alors rejoint par des synthés vintage et nous revoilà dans un générique de manga aux couleurs atrocement vives. J’ai bien peur que le morceau suivant ne poursuive la descente aux enfers des années 80. Nous sommes maintenant dans un club huppé et glauque, aux lumières crues et aveuglante. "Helix" fleure bon le gel et le sky bon marché, mais en définitive, ça groove plutôt bien. Justice choisit enfin de nous achever avec ce "Audio, Video, Disco" éponyme qui me laisse perplexe lui aussi.

Il est clair que Justice a tenté là d’élargir ses horizons, de ne pas se cantonner à l’univers qu’ils avaient créé lors du premier album. Mais le fruit de leur labeur met en exergue une chose : quand on n’est pas bon, on n’est pas bon. Cet album mélange tant bien que mal des influences et des styles, pille carrément certains passages pour nous offrir un objet vide artistiquement parlant. D’un autre côté, je l’ai dit, certains titres me laissent perplexe : je suis tiraillé entre l’envie de leur apprendre la musique en leur cassant les doigts un à un afin qu'ils ne puissent plus jamais trifouiller les boutons de leur petits ordinateurs, et l’envie de bouger et de me laisser aller à la facilité. Quoi qu’on en dise, cette dernière a parfois du bon…

J

6 commentaires:

  1. Je rebondis sur le terme "'électro-métal" ... rappellons que la musique de rappel de Justice pdt leur tournée pour Cross était "master of puppets", une des célèbre track de Metallica.

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  2. Concernant la track caché? volonté ou oubli...?

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  3. Bonsoir, Tout d'abord l'article est truffé de fautes. Ensuite pour connaître et avoir vu en live Justice depuis leurs débuts, je tiens à préciser certaines choses utiles selon moi: ce ne sont pas les inventeurs du placement du métal dans l'electro (tout ça parce que Xavier est soit disant un fan de métal), et cet album n'est pas spécialement mauvais musicalement mais c'est juste très loin de l'univers musical qu'ils avaient créé avant. Cet univers, c'était de l'électro à la française avec des gros sons saturés qui tabassent. Un truc de live comme tu dis, mais leur album cross était déjà bien plus electro. A l'époque en soirée je mettais "stress" de "A Cross the Universe" en soirée pour faire chier les minettes sensibles, maintenant c'est elles qui vont me saouler avec leur mauves "Vidéo Audio Machin" en pensant être à la pointe de l'electro. Je ne sais pas si ils se sont pris pour des intellos de l'electro (interview les inrocks "on n'est pas des bêtes du dancefloor, sûrement trop cérébraux pour ça") où si ils veulent se faire de la thune mais l'album est facile et accessible à tous (de même que le dernier de Sebastian par exemple qui a dit qu'il voulait faire danser les filles, = plus vendre ?) pour ne pas dire mainstream. Toujours est-il que je trouve qu'ils renient leurs origines en se détachant de la prestation live gonflée à la saturation et que pour un groupe d'electro, dire que "le live est secondaire voire tertiaire" c'est se tromper de musique ou de métier !
    C'était mon avis. (je me force j'essaye de le réécouter)

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  4. Je suis assez d'accord avec V: il est évident que les influences voire les goûts musicaux de Justice sont mauvais et cela se ressent sur leur musique. Pour autant, vu la qualité de cet album, je ne paierai jamais une place pour aller voir un concert de leur future tournée, quoi qu'on en dise.

    Quant à l'Anonyme, je passerai outre le fait qu’il faille apparemment être muni d’une paire de testicules pour comprendre ou être sensible à la musique et ne pas simplement osciller du postérieur sur les rythmes endiablés des musiques fascinantes que les dancefloors leur proposent. Une fois la partie misogynie mise de côté donc, je constate que l’auteur de ce message (qui aura surement oublié de signer) semble seulement réaliser que Justice a pour ambition de se « faire de la thune ». Même si globalement, l’univers musical du premier album était plus intéressant, il suffit d’observer leur stratégie marketing (docu-fiction, clips choc, publicités allant de Numéricable à Adidas en passant par Coca Cola et Assasin’s Creed) ou leur productivité effarante (3 albums dont un live en 4 ans…) pour se rendre compte qu’on n’est pas à proprement parler dans une démarche artistique. On a affaire là à deux jeunes capables, à la culture limitée qui vont s’attacher (sous la main ferme de Busy P soit dit en passant…) à plaire et à vendre à une cible qui leur ressemble… Je suis en revanche d’accord sur le dernier point soulevé concernant les lives mais je pense que leur prochaine tournée saura nous faire mentir.

    Enfin, je suis déçu que quelques fautes d’orthographe se soient glissées dans ces revues. La langue française est l’une des plus belles mais aussi l’une des plus complexes qui soit. Cela explique surement les quelques fautes que j’ai pu noter dans le commentaire (pourtant assez court…) de ce cher Anonyme (peut être un prénom scandinave tout compte fait…). En dépit de cela, je suis heureux que cet article et cette musique vous aient fait réagir !

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  5. Retour de l'anonyme ! Sans fautes cette fois si possible ! Je ne dis pas que c'est seulement une musique de mec, mais je pense qu'il y a plus de mecs qui kiffent la musique qui bastonne que de filles c'est tout (% de fille écoutant du métal ? de l'electro trash ? de la dubstep ?).

    A voir pour la prochaine tournée alors même si je ne pense pas non plus investir pour un droit d'entrée.

    Pour la défense du groupe, le fait qu'ils "dédaignent" le live est-il une preuve de leur démarche artistique ? Crise de l'industrie du disc --> rémunération des "artistes" via les lives --> dire que le live n'est pas une priorité = preuve d'une démarche purement artistique ?

    Vous avez dit masturbation intellectuelle ?

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  6. Ah cher Xavier! Qu'il est bon et presque convivial de pouvoir s'adresser à un nom, une identité, une personne.

    Visiblement nos avis divergent (et dix verges c'est énorme, comme disait l'autre...) mais qu'importe! Pour être honnête, les univers que tu décris ne sont pas les miens et je veux bien te croire concernant la part de personnes représentées par la gente féminine dans ces genres musicaux.

    Ensuite, je me permet de te soumettre une nouvelle équation quant à notre débat sur la démarche de Justice. Attention, elle est plus simple mais faut suivre:

    Selon l'affirmation suivante: "Justice a fait beaucoup de lives pour arriver à son degré de notoriété actuel" et si on assume que la "notoriété" susdite a été atteinte, alors on a avec le théorème de Thales:

    Justice + Notoriété + pubs en tous genres = pas besoin de faire des lives, on est déjà pleins aux as.

    Par conséquent, nous sommes désormais en mesure d'affirmer que Justice = pas de démarche artistique.

    J'ai arrêté les maths en 4ème mais ça a l'air de tenir la route...

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