mardi 23 août 2011

Beethoven - 6ème Symphonie dite "Pastorale" ou "Comment faire de la musique classique moderne"


S’il y a bien un pays dont on ne parle pas beaucoup dans la musique moderne, c’est l’Allemagne et ses contrées verdoyantes. Et pour cause ! nos amis teutons ont rarement raflé la mise au cours du siècle en cours ou même du précédent et c’est pas les Scorpions, Motorhead ou autres Nina Hagen qui vont me contredire... Mais si j’ai envie de vous parler de ce pays méconnu et décrié aujourd’hui c’est pour une toute autre raison. Tout d’abord, ma chère et tendre est native du pays en question ce qui constitue une raison nombriliste, certes, mais vous étiez prévenus donc bon… Ensuite, l’Allemagne a vu naitre un nombre incalculable de génies musiciens au cours des siècles et une fois n’est pas coutume, j’ai choisi de vous parler de l’un d’eux aujourd’hui. Je ne vais pas vous faire languir plus longtemps, on va parler de musique classique et je vous vois venir de très loin… « eh le classique c’est pas de la musique moderne ! eh pis c’est nul, c’est pour les bourges qui se parfument etc, etc… ». D’un côté, vous n’avez pas tout à fait tort. D’un autre, vous ne savez même pas de qui je vais parler, donc je serais vous, je me tairais et je lirais (et bam…). En effet, l’illustre génie dont il est question dans cette chronique n’a rien d’un has been mes agneaux puisqu’il s’agit de Beethoven et parmi les innombrables qualificatifs qui peuvent décrire le bonhomme, l’un de ceux qui vient le plus à l’esprit, après « sourd », c’est bel et bien « moderne ». Qui plus est, nous allons aborder ensemble la 6ème de Beethoven, dite « Pastorale » c'est-à-dire champêtre, simple, belle. Rien à voir avec Wolfgang Amadeus Bradwurst, alias « la saucisse de Salzbourg ».

Pour ceux qui pensent que la musique classique est d’un ennuie monumental, il faut d’abord comprendre une chose. Dans le classique comme en musique en général, tout s’articule plus ou moins autour de deux choses principales : les tensions et les résolutions. Si comme la plupart des gens normaux, vous n’avez pas fait d’étude de musicologie avancées ou n’êtes pas sortis du conservatoire avec votre médaille d’or en main et que vous ne faites donc pas partie de cette caste d’illustres inconnus bouffis d’orgueil et d’arrogance, cela signifie donc que certains accords ou notes créeront en nous une tension qui sera ensuite prolongée ou pas jusqu’à un accord ou note qui supprimera cette tension. Pour faire simple, et comme l’explique un chef d’orchestre génial, le classique c’est un peu comme rentrer à la maison. La tension se résolvant, on se sent bien, comme rentré chez nous. Alors au départ, les musiciens ont appliqué ce système de manière très rigoureuses avant d’arriver à quelque chose de beau mais encore très mathématique. Il suffit par exemple d’écouter le 1er Prélude de Bach pour comprendre cette histoire de tensions résolues. Mais il serait réducteur de penser que les allemands ont foncé tête baissée dans les règles et l’ordre froid ! Quelques uns d’entre eux étaient fous et romantiques et c’est fort heureux. Et puis d’abord, c’est pas parce que Beethoven était fou et sourd qu’il n’avait pas un cœur. Tout comme ce n’est pas parce que Wagner aurait préféré serrer la main de Le Pen plutôt que de passer à moins de 2m d’une kippa surgelée que sa musique n’est pas grandiose. Ce n’est pas non plus parce que notre breton borgne national renâcle à l’idée d’une politique ouverte et ne prône pas l’intégration que celui-ci n’est pas contre l’idée de manger une crêpe au sarrasin de temps en temps. Au diable les préjugés. Asseyez-vous dessus et écoutez donc ça…


Dés les premières notes du premier mouvement, on a l’impression d’assister à la création du monde. Les instruments semblent avoir perdu tout leurs attributs et en avoir acquis de nouveaux. La fraîcheur intense qui émane des thèmes simples et puissants de ce mouvement semble être tirée directement du bleu métallique des lacs qui peuplent les yeux de ma douce.  La modernité de Beethove nous frappe en plein visage tout de suite. D’une part, comme j’en ai fait mention, les thèmes sont d’une efficacité redoutable tout en étant d’une beauté implacable. D’autre part ils se répètent et s’harmonise d’une manière simple qui donne un relief sans précédent à la musique tout en donnant la possibilité à l’auditeur de percevoir les différents niveaux de profondeurs et d’avoir ainsi un meilleur aperçu de la toile magistrale qui s’étale sous ses yeux. Tour à tour, le chef d’orchestre semble indiquer à ses ouvriers qu’il veut qu’on dresse une colline ici, des arbres massifs par là et qu’une lumière douce inonde littéralement le tout. Le monde se dessine petit à petit avec une facilité déconcertante sous nos yeux effarés. Le thème revient ensuite au gallot déverser les couleurs cramoisies d’une beauté hallucinante sur une toile qui semble d’une grandeur infinie. Les nuances sont vives et marquée mais le tout s’assemble parfaitement.

Le deuxième mouvement se veut encore plus langoureux et romantique que le précédent. Nous voilà désormais flottant hilares sur quelques rivières aux couleurs de crépuscule, bercés par les flots doux et la plume du chef d’orchestre qui poursuit son œuvre tranquillement. Nous descendons la vallée, titillés par les courbes mélodieuses des sentiments d’un homme qui n’a plus rien d’un fou. Soudain, tout semble clair, tout ce qu’il dit, tout ce qu’il écrit, tout ce qu’il ordonne a un sens divin et lui résister serait folie. Quelque chose en nous ou bien dans cette musique nous pousse inlassablement vers la suite, et nous nous laissons guider, tels des pachas emplis d’une paresse lourde et chaleureuse. Les détails du décor se veulent plus fouillés et bientôt la scène sera posée.


Le troisième mouvement vient ensuite nous réveiller un peu. Le thème sautillant a quelque chose de presque enfantin et de déraisonnable. Un coup joueur, l’instant d’après hargneux et démesuré. Le morceau est fougueux et nous traine dans une danse acharné mais salvatrice. Ce mouvement est complètement déjanté et on comprend le piège délectable dans lequel nous nous sommes jetés avec engouement  mais la punition est tout aussi divine que ce qui a précédé. Le quatrième mouvement rage et des éclairs semblent s’abattre près de nous. Tout s’est obscurcit en un instant et nous voilà désormais plongé dans un tourbillon sans fin de violons vindicatifs.


Puis, comme tout s’était emballé, le calme revient. Le dernier mouvement nous entraine à nouveau dans un flot de lumière et de notes à vous faire chialer  comme une madeleine.  L’artiste fini sa toile en peignant les courbes du corps céleste d’un ange blond à la beauté exquise. Cette musique ne fond pas seulement dans la bouche mais elle illumine la totalité des cavités de votre corps jusqu’à ce que vous ne vous sentiez pas plus lourd qu’un nuage. Puis il semble que les rivières sur lesquels nous voguions un peu plus tôt déverse leur eau fraiche et claire en nous et nous fassent redescendre lentement mais surement. Et là, tout s’éclaire une dernière fois. Vous souriez, vous avez compris, vous n’êtes plus qu’un avec le chef d’orchestre, votre visage est éclairé du sourire serein de celui qui est sûr, vous êtes enfin rentrés chez vous.

La musique de Beethoven est en effet dotée d’une grande modernité pour son époque. Outre le fait qu’il introduit le romantisme dans le classicisme, ses mélodies sont simples et belles et les arrangements plutôt épurés et profonds. Ce n’est pas pour rien que Jeff Buckley disait de lui que c’était le plus grand compositeur de musique punk. Il nous permet également de prouver que l’Allemagne n’est pas qu’une patrie ayant permis des avancées technologiques considérables dans le monde automobile ou dans les technologies des fours à pizza… Allemagne, mon amour, je t’aime.  

J

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